Comment “faire” son deuil ?

Le mot « deuil » provient du terme latin « dolere » qui signifie « souffrir ».

Mais, le définir comme un « état affectif douloureux provoqué par la mort d’un être aimé » est bien trop réducteur. En effet, en français, le terme de « deuil » désigne plusieurs éléments :
—— ⤳ La tristesse profonde ressentie : « être en deuil »
—— ⤳ Les comportements mis en place : « porter le deuil »
—— ⤳ Le processus psychologique nécessaire : « faire son deuil »
Dans cet article, je vais surtout aborder la troisième façon d’employer ce terme.

✨ Le deuil peut désigner la perte d’une personne, d’un objet, mais il peut également désigner un changement brutal dans la vie ou dans l’état de santé.
Chacune de ces ruptures implique la mise en place d’un processus appelé travail de deuil.

L’emploie du mot « faire » sous-entend que tu dois consciemment effectuer un travail pour accepter la perte.
Quelques temps après, tu te questionnes : Ai-je fait le deuil ? Et si non, comment le faire ? Pour cela, on te parle de certaines étapes pas lesquelles tu devrais théoriquement passer, mais on ne dit jamais exactement ce que tu dois « faire » justement.

Dans cet article, je te parle des limites de ce modèle du deuil sous forme d’étapes, et je te propose plutôt un début de réponse à la question : Comment « faire » son deuil ?

« La mort est une surprise que fait l’inconcevable au concevable »

Paul Valéry

Le deuil : un phénomène normal

Être en deuil est une expérience commune à tous mais bouleversante pour chacun.

Il n’y a aucun doute, être confronté à la mort fait souffrir psychiquement.
Mais, cette tristesse est :
—- Normale : c’est son absence qui serait pathologique, selon Deutsch
—- Nécessaire : elle permet à chaque personne de questionner le sens de sa vie

Or, nous supportons de moins en moins la souffrance provoquée par un deuil.
Elle est vécue comme anormale. Et, trop souvent, on tente de l’éviter par recours aux médicaments. Le deuil est alors pathologisé, il est vu comme une maladie mentale à traiter.

☝🏼 La psychanalyse a joué un rôle dans la pathologisation du deuil.
Longtemps, le texte « Deuil et Mélancolie » de Freud a été la référence en terme de deuil. Il y aborde la mélancolie, en s’appuyant sur le deuil comme modèle « normal » de cette pathologie dépressive. Ce parallèle a alors introduit un lien entre deuil et dépression.
Mais il est nécessaire de considérer que ce lien n’est pas systématique.

« Ne mettez pas d’obstacle au mouvement de la douleur. Laissez-le mûrir »

Krishnamurti

Le processus de deuil

Le processus de deuil est une dynamique involontaire qui s’enclenche naturellement dès le début du deuil. Le psychisme mobilise ses forces pour cicatriser la blessure de la perte, comme le ferait le corps dans la cicatrisation d’une blessure physique.
C’est un phénomène normal, bien qu’il puisse avoir, dans un premier temps, un aspect pathologique.

Les étapes du deuil

A quelques variations près, les auteurs s’accordent à reconnaître 3 grandes étapes dans le déroulement du deuil :
➛ un début : L’état de choc
➛ une période centrale : L’expression du chagrin
➛ un terme : L’achèvement du deuil

L’état de choc

Après l’annonce de la mort, la personne ressent une profonde douleur. Cette phase dure les jours qui suivent le décès. Les fonctions psychiques sont mise à l’arrêt, la personne subit des conséquences traumatiques telles que la sidération.
Les sentiments qui dominent sont la colère et l’angoisse. La personne se sent abandonnée par le défunt, elle trouve son départ injuste. Les pleurs sont alors une solution adaptée pour surmonter cet état. Néanmoins, ils ne permettent pas le deuil, seule la pensée le peut.

L’expression du chagrin

Cette phase dépressive est fondamentale dans le processus de deuil. La personne souffre de symptômes somatique, affectifs et intellectuels similaires à la dépression.  
Durant cette phase, un processus psychique intense se met en place. La pensée se remet en marche. Peu à peu, la personne repense à tous les moments passés ensemble, aux souvenirs partagés, afin de les voir d’un nouvel oeil, de les investir différemment.

L’achèvement du deuil

Le deuil se termine lorsque la personne peut parler de son proche sans s’effondrer. La période dépressive s’estompe pour laisser place à un sentiment de liberté pour profiter de la vie, vécu au début avec culpabilité, puis progressivement accepté.
Cependant, la fin du deuil n’est pas l’oubli.

Après chaque deuil, la personne ne sera plus jamais comme avant.
Mais, cela n’est pas forcément négatif, elle peut sortir grandie suite aux épreuves traversées.

⚡️ Ces phases ont été mises en lien avec les stades psychologiques observés chez les patients en fin de vie, décrits par Kübler-Ross : déni, marchandage, colère, dépression et acceptation. Aujourd’hui, on décrit ces étapes comme les étapes du deuil, mais ce n’est pas dans ce cadre que l’auteur les a décrites. De plus, ce modèle est vivement critiqué pour son manque de preuves scientifiques.


Le deuil par étapes, vraiment ?

J’ai choisi de te parler ici d’un modèle très général des étapes du deuil, pour qu’elles conviennent à un maximum de situations.
Il existe d’autres modèles plus détaillés, mais ils présentent de nombreuses limites.
Ces modèles du deuil par étapes donnent l’illusion que le « travail du deuil » est un processus qui se déroule de manière linéaire et qui permet un retour à la normale, comme si rien ne s’était passé.

Le deuil est un apprentissage progressif de l’absence de l’autre. Mais, il n’est pas un déroulement linéaire d’étapes prévisibles, on peut plutôt le voir comme :
—– une spirale qui tournoie sur elle-même, dans laquelle le processus se répète et comprend parfois des retours en arrière.
—–des vagues qui vont et viennent en ressassant sans cesse la douleur, sans que la personne ne puisse s’y opposer.

✨ Ainsi, il n’y a pas d’étapes à passer les unes après les autres, mais plutôt des états qui peuvent varier en qualité et en quantité en fonction des individus.


« Tu n’es plus là où tu étais, mais tu es partout là où je suis »

Victor Hugo

Le travail de deuil

Le terme « travail de deuil » a été employé pour la première fois par Freud.
Le deuil serait une activité solitaire pour s’accommoder de la perte et surmonter la douleur, c’est-à-dire une démarche volontaire entreprise par la personne pour favoriser le bon déroulement du processus de deuil.

👉🏼 Freud explique que le travail de deuil renvoie à :
—-la profonde tristesse
—-l’incapacité de s’intéresser au monde
—- l’envahissement par les souvenirs
Progressivement, ce travail doit aboutir au dénouement des liens qui attachaient la personne au disparu et à l’investissement de nouveaux intérêts.

👉🏼 Bowlby explique que dans le deuil, avant que la tristesse apparaisse, c’est l’anxiété de séparation qui se manifeste.
La personne souhaiterait maintenir les liens qui l’unissaient au défunt, ces liens perdurent même après le décès. Donc, il n’est pas forcément nécessaire de dénouer en totalité les liens au disparu, ils doivent être simplement modifiés.

C’est maintenant que je te donne quelques pistes pour faciliter ton travail de deuil !

Le travail de deuil répond à 4 tâches qui ont lieu simultanément sans ordre chronologique :
—– admettre la réalité du décès
—–accepter de vivre les émotions qui te traversent
—–nourrir un lien avec la personne disparue
—– cultiver un nouveau rapport au monde et aux autres

Admettre la réalité du décès

Une certaine sidération suit le décès. La prise de conscience n’est pas immédiate, tu es « sous le choc ». Néanmoins, pour débuter réellement le travail de deuil, tu dois reconnaître l’existence et la permanence de la perte. Cela peut prendre plusieurs semaines, voire plusieurs mois.
Admettre la perte ne signifie pas l’accepter, mais il s’agit d’arrêter de lutter contre la réalité pour se libérer de la douleur de la lutte.

Accepter de vivre les émotions

Dans le deuil, les émotions telles que le vécu dépressif, la colère ou la culpabilité, peuvent être violentes. Il est essentiel de les accueillir telles qu’elles sont et de ne surtout pas les refouler. L’expression de tes émotions permet de diminuer la charge émotionnelle et donc la douleur.
Les émotions peuvent donner une impression de répétition, une impression de ne pas avancer dans son deuil. Mais c’est faux, l’émotion est le langage de l’inconscient, qui travaille forcément vers le dépassement de la situation.

Nourrir un lien avec la personne disparue

Ton lien avec la personne décédée doit être maintenu mais d’une manière adaptée. Il s’agit d’un lien intérieur qui ne perturbe pas ta vie quotidienne. Il doit être lucide, c’est-à-dire prendre en compte la personne disparue dans ses défauts comme dans ses qualités.
Il se met en place avec du temps et à l’aide de rituels personnalisés. Ton proche n’est plus là dans la réalité mais il est présent dans ton psychisme.

🌸 Pour exprimer cette idée, je dis souvent qu’« une personne ne meure réellement que lorsque la dernière personne qui pense à elle meure à son tour ».

Cultiver un nouveau rappeler au monde et aux autres

Le deuil est une crise existentielle qui questionne la fragilité des choses et le sens de la vie.
Au cours du travail de deuil, tu pourras constater des changements très positifs chez toi, comme te trouver plus ouvert, plus mature, plus empathique, etc…

Tes liens aux autres seront changés, davantage orientés par l’amour et le partage que par ce que tu fais ou ce que tu possèdes. L’ultime but est de reprendre plaisir à vivre, de démarrer de nouveaux projets, sans culpabiliser.

« Parler de ses peines, c’est déjà se consoler »

Albert Camus

Et donc, “faire son deuil”, ça veut dire quoi ?

A mon sens, cette formulation peut s’avérer très culpabilisante.
Pourtant, ce travail conscient et inconscient, demande du temps et de l’indulgence de la part de l’entourage et de la société.

L’expérience du deuil doit être vécue, transformée et dite.
Mettre en place les éléments que j’ai abordé plus haut restaure l’équilibre intérieur en répondant à une injonction paradoxale : oublier et se souvenir.

Il ne faut pas tomber dans l’écueil de psychologiser ou pathologiser le deuil, il n’y a rien de plus normal. Mais, il ne faut pas non le banaliser, il n’y a rien de plus douloureux.
« Faire son deuil » signifie donc fournir un effort pour réécrire une histoire de vie harmonieuse qui intègre les événements de vie douloureux.

💪🏼 Dans cet article, j’espère que tu auras pu trouver quelques idées pour surmonter ces épreuves douloureuses.
Si toi-même tu as des pistes de solution qui t’ont été utiles, tu peux les écrire en commentaire afin de soutenir chaque personne confrontée à la grande question : « Comment faire son deuil ? »


Bibliographie

Alain BercovitzAccompagner des personnes en deuil. Érès, 2004
Laurie LauferL’énigme du deuil. PUF, 2006
Marie-Frédérique Bacqué & Michel HanusLe deuil. PUF, 2020
Pascal DreyerFaut-il faire son deuil ?Perdre un être cher et vivre. Autrement, 2009
https://mieux-traverser-le-deuil.fr/

Pourquoi une victime de viol ne crie-t-elle pas toujours ?

Le 21 janvier 2021, le Sénat a voté la loi qui fixe un seuil d’âge de non-consentement à 13 ans.
Ainsi, tout majeur qui aurait une relation sexuelle avec un mineur de moins de 13 ans sera accusé de viol et puni de 20 ans de prison.
Cette loi a fait débat concernant l’âge. Beaucoup auraient préféré que ce dernier soit fixé à 15 ans, l’âge de la majorité sexuelle en France. Néanmoins, cette loi a le mérite de protéger les jeunes mineurs. La preuve du non consentement de l’enfant ne fera plus débat dans les tribunaux.

C’est justement ce qui m’a donné envie de rédiger cette article : Est ce qu’une victime de viol est entièrement capable de manifester son non-consentement ?


Qu’est ce qu’un viol ?

Le viol est un crime.
La loi le décrit comme « tout acte de pénétration de quelque nature que ce soit commis sur la personne d’autrui par violence, contrainte, menace ou surprise ». S’il n’y a pas eu pénétration, il n’y a pas viol mais agression sexuelle.

Le viol fait donc partie des violences à caractère sexuel, c’est-à-dire des actes commis avec violence, contrainte, menace ou surprise.
En clair, il y a viol lorsque la victime n’a pas exprimé un consentement clair et explicite..

Il n’est pas nécessaire qu’il y ait des violences physiques pour qualifier un acte de viol.
La contrainte peut-être :
—-physique résulte de l’utilisation de la force de la part de l’agresseur.
—- morale résulte de l’autorité implicite ou explicite qu’exerce l’agresseur sur sa victime, par exemple un parent sur son enfant ou encore une supérieur hiérarchique sur un employé.
—- physiologique lorsque la victime est sous l’emprise de drogues ou vulnérable de par son état de santé.

💫 La connaissance de l’impact traumatique du viol est essentiel pour mieux lutter la culture du viol mais aussi pour mieux entendre et protéger les victimes.  

« La violence : une force faible »

Vladimir Jankélévitch

Qu’est ce que la culture du viol ?

Théoriquement, il semblerait que l’on soit tous d’accord pour dire que le viol, c’est mal ! Sauf qu’en pratique, beaucoup ajoutent des exceptions à cette évidence.
Le problème, c’est que ces exceptions sont l’un des symptômes de la culture du viol.

Ces exceptions sont principalement :
—–l’attitude de la victime qui « justifie » le viol
—–la réaction de la victime qui ne permet pas de « faire cesser » le viol
La conséquence est la même : la culpabilisation de la victime, c’est la victime qui est accusée et non l’agresseur.

En quelques chiffres, aujourd’hui, 4 français sur 10 estiment que :
– si la victime a été « provocante » en public, alors la responsabilité du violeur est atténuée.
– si l’on crie et que l’on se défend autant que l’on peut, alors l’agresseur va fuir.
La victime est coupable, de l’avoir bien cherché avec sa tenue ou de ne pas manifester son non-consentement.

STOP ! Une seule affirmation est vraie : « il impossible de prévoir la réaction d’une victime pendant un viol ». Si certaines résistent, beaucoup se retrouvent dans une incapacité de réagir.

En effet, tous les courants de psychologie s’accordent pour affirmer que ce qui fait traumatisme n’est pas l’évènement en tant que tel mais ce qu’il provoque dans le psychisme de la personne, en fonction de ses dispositions au moment où cela survient : « il n’y a de traumatisme que pour un individu donné, à un moment particulier de son histoire ».
Chaque victime réagira donc différemment à un même évènement.

💫 La culture du viol c’est la loi du silence.
Une victime de viol ne crie pas, ne parle pas, et il y a des explications sociales à cela.
Mais, ici, je vais te parler surtout des explications psychologiques de ce silence : l’impact traumatique.

La connaissance des mécanismes à l’oeuvre et la reconnaissance du vécu des victimes sont impératives.
Pour lever ces a priori absolument faux, il est donc indispensable de faire connaître l’impact traumatique des violences sexuelles sur la santé mentale et physique des victimes.


Quel est l’impact traumatique d’un viol ?

Le viol vient menacer la victime dans :
—– son intégrité physique : elle est confronté à l’éventualité de sa propre mort
—–son intégrité psychique : elle est confronté à une situation incompréhensible, dégradante, humiliante, injuste, incompréhensible
Il s’agit donc un traumatisme susceptible d’être à l’origine de mécanismes psychiques particuliers.

L’effraction psychique

Lorsque l’on évoque le traumatisme, il est tout d’abord essentiel de le différencier du stress.
Lebigot propose, pour cela, les deux schémas suivants :

Le cercle rose représente l’appareil psychique, et la flèche, l’événement qui survient.

Le stress

L’événement fait pression sur l’appareil psychique, l’écrase partiellement. Il se déforme sous la pression.

En cas de stress, l’appareil psychique est en souffrance, en raison de son écrasement. Il est « sous pression ».
Mais, il ne subit aucune effraction, rien de l’extérieur ne pénètre à l’intérieur.

Une fois l’évènement passé, le psychisme va peu à peu reprendre sa forme initiale.
La souffrance s’estompera alors en quelques heures, semaines, mois ou années.

Le trauma

L’évènement est une menace vitale qui survient par surprise. L’appareil psychique ne se déforme pas mais il est percé.

La représentation de cette menace vitale va pénétrer à l’intérieur de l’appareil psychique.
Elle va y faire effraction, le traumatisme va rester ancrer dans le psychisme sous la forme d’une image.

La disparition de l’événement n’aboutira pas à un retour à la normale.
L’image traumatique restera gravée et causera des perturbations du fonctionnement psychique pendant une très longue période.

Le traumatisme surgit par surprise, l’individu n’a pas pu l’anticiper et s’y préparer.
Il y a donc effraction psychique, la personne est débordée par l’évènement, elle n’a pas les capacités d’y faire face. La conséquence est une grande souffrance, que le psychisme va mettre des années à surmonter.

🧠 Les conséquences de cette effraction sont aussi neurobiologiques. Le système émotionnel est en survoltage, le cerveau va donc créer un court-circuit pour protéger la victime.
Clique ici pour en savoir plus…

Ces mécanismes neurobiologiques sont responsables de la sidération psychique et de la dissociation traumatique


La sidération psychique

Lorsqu’une personne subit une agression, son cerveau veut assurer sa survie. Deux solutions sont envisageables : « Fight or Flight », se battre ou fuir.
Il se prépare physiquement à réagir. Il produit donc une réaction de stress, il contracte les muscles, accélère le rythme cardiaque, augmente son attention, etc…

Mais, si l’agression présente un risque vital, alors le cerveau est saturé de stress.
Il prend alors une décision différente, il décide que les meilleures chances de survies sont l’absence totale de réaction. Au lieu de préparer la personne à réagir physiquement, il va alors produire des substances anesthésiantes.

🧠 Face à l’effraction psychique, l’amygdale va secréter une trop grande quantité d’hormones de stress : l’adrénaline et le cortisol.
Cela entraine un risque vital neurologique et cardiovasculaire. Pour éviter cela, la seule solution est de déconnecter l’amygdale par la sécrétion de morphine et de kétamine, de puissantes hormones anesthésiantes.

La victime est alors « shootée » : elle est déconnectée, anesthésiée physiquement et psychiquement. Les fonctions mentales et physiques sont bloquées.
Elle est paralysée, ne peut plus se défendre, crier ou bouger. Elle peut même éprouver des difficultés à penser, notamment à estimer le temps qui passe et à prendre la mesure des évènements.

La sidération va totalement empêcher la victime de réagir !
En plus de l’empêcher de crier, cela créé une grande culpabilité qui l’empêchera d’évoquer le viol par la suite.


La dissociation traumatique

L’anesthésie émotionnelle, décrite plus haut, conduit également la victime à un état dissociatif.
Privée de ses émotions, elle ressent un sentiment de déconnexion, comme si elle était spectatrice de la situation. La personne a l’impression de contempler la scène de l’extérieur, comme si ce n’était pas elle qui était en train de la vivre.

Elle a un sentiment de :
—-déréalisation : le monde extérieur lui semble étrange et irréel
—- dépersonnalisation : elle se sent étrangère à elle-même
La dissociation touche donc la victime elle-même et son environnement.

Elle apparait comme indifférente à ce que son agresseur lui fait subir, là encore, elle est privée de toute réaction !

Cette dissociation traumatique peut durer quelques minutes voire quelques heures. Mais elle peut également s’installer dans la durée et même devenir chronique. Dans ce cas, la dissociation va altérer :
⇨ les capacités relationnelles de la personne
⇨ l’expression de sa personnalité
⇨ ses possibilités de réagir face à d’autres dangers potentiels
Elle sera alors exposée à un grand risque de subir de nouvelles violences.

« Le traumatisme c’est comme une blessure, une blessure à l’âme. Il faut du temps pour consolider la cicatrice »

Tobie Nathan

Conclusion

Une victime ne crie pas pendant un viol et ne parle pas à posteriori de ce viol à cause de la culture du viol qui demeure trop présente dans notre société et, d’autre part, à cause de mécanismes psychologiques bien connus !

Les principaux effets psychologiques d’un traumatisme, tel que le viol, sont :
——l’effraction traumatique qui surprend la victime et la rend incapable de faire face
—— la sidération qui paralyse la victime et l’empêche de crier, de se débattre ou de fuir
—— la dissociation traumatique qui anesthésie la victime, l’empêchant de se rendre compte de ce qu’elle subit

Si ces mécanismes psychotraumatiques étaient mieux connus et pris en compte, alors la parole et les réactions des victimes ne seraient plus jugées, ni remises systématiquement en cause.
Les victimes seraient ENFIN reconnues et soutenues.

👊🏼 Grâce à cet article et à tous les autres qui traitent de ce sujet, j’espère qu’un jour plus PERSONNE ne remettra en cause la réaction ou la parole d’une victime.
L’espoir fait vivre… mais c’est pour ces causes que l’on fait ce métier !


Bibliographie

Cyril Tarquinio & Sébastien MontelLes psychotraumatismes. Histoire, concepts et applications. Dunod, 2014
Éric Baccino & Philippe BessolesVictime-Agresseur. Tome 1. Le traumatisme sexuel et ses devenirs. Champ social, 2001.
François LebigotTraiter les traumatismes psychiques. Clinique et prise en charge. Dunod, 2016.
Joanna SmithPsychothérapie de la dissociation et du trauma. Dunod, 2016.

Comment réagir à la dépression d’un proche ?

La dépression modifie les relations de la personne avec son entourage, ce qui peut entrainer :
—–un bouleversement des repères familiaux,
—– une dégradation des relations,
—– une souffrance des proches.

Néanmoins, le soutien de l’entourage est un facteur de protection. Un entourage présent et soutenant participe à l’amélioration de la maladie.
Les proches sont donc essentiels dans le parcours thérapeutique de la personne souffrant de dépression.

Or, ils sont souvent les grands oubliés des prises en charge. Ils ne savent pas toujours quelle attitude adopter et se retrouvent fréquemment démunis.
Dans cet article, je souhaite te parler de ce qui peut te permettre d’accompagner au mieux ton proche atteint de dépression.

📊 La dépression est un véritable enjeu de santé publique.
Au cours de la vie, la dépression est susceptible de toucher environ 1/6 homme et 1/4 femme.


Quel impact de la dépression pour l’entourage ?

Depuis longtemps, les chercheurs ont démontré le lien entre la souffrance psychique d’une personne et celle des membres de sa famille.
Que la personne souffre en raison des conflits familiaux ou que la souffrance familiale provienne des symptômes de la personne, l’ensemble du groupe familial est confronté à la dépression.

Quel que soit les symptômes dépressifs de l’individu, sa famille souffre avec lui. L’entourage et l’individu partagent des sentiments :
de tristesse
d’impuissance
de culpabilité

La tristesse est inhérente à la dépression, elle est même sa composante principale. Elle infiltre toutes les sphères de la vie de la personne, incluant ses relations aux autres.

L’impuissance touche aussi bien la personne, qui est dans l’incapacité de percevoir un avenir meilleur, que ses proches, qui ne savent comment aider la personne à retrouver la pulsion de vie qu’elle a perdue.

La culpabilité est, elle aussi, présente des deux côtés. L’individu s’en veut de faire souffrir son entourage. Les proches cherchent le rôle qu’ils auraient pu tenir dans l’apparition de la maladie. Or, la dépression n’est jamais liée à une unique cause, elle est issue de multiples facteurs.

« La tristesse vient de la solitude du coeur. »

Charles de Montesquieu

Qu’est ce que la dépression ?

Des études démontrent que l’entourage est moins touché psychologiquement lorsqu’il comprend que les attitudes de son proche sont dues à la dépression et non à sa personnalité.
Ainsi, expliquer les implications de cette pathologie fait naître en lui des sentiments d’espoir et d’empathie.

Dans ce chapitre, je vais donc prendre le temps de t’expliquer ce qu’est la dépression. Si tu as déjà des connaissances sur ce trouble, alors file au chapitre suivant !

⚠️ Se sentir triste, avoir « la flemme » ou des soucis de sommeil ne signifie pas obligatoirement souffrir de dépression. Ces sentiments font partie de la vie. La tristesse et la douleur sont des émotions humaines normales.
Il ne faut pas confondre ces moments de « déprime » avec le diagnostic de dépression.

Le terme de dépression ne s’emploie pas à la légère.
Pour poser le diagnostic, cela nécessite plusieurs symptômes spécifiques qui doivent :
—– ⇨ générer une souffrance importante et inhabituelle
—– ⇨ se manifester :
————– depuis au moins 15 jours,
————–quasiment chaque jour,
————–presque toute la journée.

La 3 symptômes principaux

Les émotions et les pensées d’une personne dépressive sont marquées par une souffrance permanente.
Cette douleur est plus désagréable que toutes les autres que l’individu a déjà connu. Elle est une véritable rupture dans la vie de la personne. Elle le coupe de son fonctionnement habituel, mais aussi de son entourage.

Dans la dépression, deux autres symptômes s’associent à la souffrance :
—- une tristesse qui semble envahissante, inapaisable et incompréhensible, elle ne semble pas directement reliée à une cause.
—-une perte d’intérêt et de plaisir pour tout ce qui passionnait l’individu auparavant. Tout semble terne, sans importance et sans signification.

Les symptômes spécifiques

Ces symptômes sont durables et sont présents dans différents domaines de la vie quotidienne :
———- La vie affective
———-Le fonctionnement intellectuel
———-Le fonctionnement physiologique

La vie affective :
Hypersensibilité / Anesthésie affective : les personnes souffrant de dépression peuvent réagir avec excès ou bien, à l’opposé, avoir la sensation de ne plus éprouver d’émotions.
Sentiment d’abandon, d’inutilité et de solitude : les personnes ont le sentiment de ne pas être aimées, de n’avoir rien à dire d’intéressant, de ne plus être dignes d’intérêt.

Le fonctionnement intellectuel :
Difficultés intellectuelles : il est difficile de réfléchir, de s’adapter et d’accomplir des tâches qui paraissaient naturelles auparavant. Ces manifestations sont liées à une diminution de l’attention, de la concentration et de la mémoire.
Dévalorisation de soi : la personne se sent incapable, se pense sans valeur. Il lui est difficile de demander de l’aide et de croire qu’un traitement peut changer sa condition.
Pensées négatives : la personne analyse ce qui l’entoure sous un angle systématiquement négatif. Cela peut aller jusqu’à des pensées autour de la mort.

Le fonctionnement physiologique :
Fatigue : la sensation de manque d’énergie se mêle au découragement. Cela s’accompagne d’une altération du sommeil, la fatigue dépressive ne cesse pas avec une bonne nuit de sommeil. L’appétit est également perturbé, les aliments semblent insipides et cuisiner apparaît comme une corvée.
Ralentissement : les émotions, les pensées, la parole et les gestes sont ralentis par la maladie.
Symptômes physiques : des douleurs comme des maux de tête ou des soucis digestifs peuvent apparaître.

☝🏼 N’oublie pas d’expliquer la dépression aux aux gens qui t’entourent car beaucoup de conflits ou de ruptures proviennent de la méconnaissance de ce trouble.

La dépression ne se résume pas à la tristesse, elle est un ensemble complexe de symptômes.
Contrairement aux stéréotypes, elle n’est ni une fatalité, ni une preuve de faiblesse. Elle peut toucher chacun de nous à un moment de la vie.

La volonté n’est pas suffisante pour s’en sortir, entre autre car cette maladie implique des pensées négatives et une dévalorisation de soi.
Le rôle de l’entourage prend alors tout son sens dans la prise en charge.

« La dépression frappe au hasard : c’est une maladie, pas un état d’âme. »

Tahar Ben Jelloun

Que dire, que faire quand son proche est en dépression ?

La dépression est douloureuse pour la personne qui la vit, mais également pour les gens qui l’entourent. Deux raisons expliquent cela :
—— ⤳ la dépression est un trouble difficile à comprendre pour quelqu’un qui ne l’a jamais vécue.
—— en tant que proche, il est compliqué de trouver une « juste place » pour venir en aide au mieux.

Quelle attitude adopter ?

——– La compréhension

Il est important que tu gardes à l’esprit que la dépression est une maladie et non un choix de la personne. Cela passe, notamment, par l’apprentissage des symptômes, des causes et des traitements possibles.

Comprendre c’est aussi intégrer qu’il est extrêmement difficile de guérir d’une dépression.
Il te sera alors beaucoup plus facile de tolérer la situation et d’accepter les rechutes dépressives, qui font malheureusement partie intégrante de la maladie.

Les interprétations sur ce qui a provoqué la dépression sont souvent très éloignées des causes réelles du trouble. Plutôt que de perdre un temps précieux à te demander « pourquoi ? », concentre-toi sur l’acceptation de la situation et demande-toi « comment ? » aider au mieux.
La compréhension se centre surtout sur le « comment ? » plutôt que sur le « pourquoi ? ».

——– La bienveillance

Un soutien efficace suppose le respect d’une « juste distance », c’est-à-dire une présence bienveillante mêlant affection, écoute et patience.
Néanmoins, il n’est pas question de devenir « étouffant », au risque d’infantiliser ton proche, de participer à la dévalorisation de lui-même, et de le rendre dépendant de ton aide.

Cette attitude passe par :
—- Une ouverture à la discussion. Même si la personne a tendance à ressasser, à se répéter ou à rester sourd à tes mots réconfortants, il est essentiel de toujours est disponible pour l’écouter.
—- Une valorisation de ses efforts. Que ce soit par la parole, par un geste ou un sourire, il est essentiel de mettre en valeur chaque amélioration.
—- Des petites attentions particulières. Cela ne pourra qu’être bénéfique, même la personne ne montre pas l’enthousiasme que tu attendrais. Cette indifférence une manifestation de la dépression, et non pas un manque de reconnaissance.

——– L’empathie

L’empathie est la capacité à s’identifier à quelqu’un dans ce qu’il ressent. Cela implique de rassurer ton proche en lui disant que :
————– tu comprends ses difficultés,
————– tu ne le penses pas fou,
————–c’est une maladie qui touche des milliers de personnes,
————– l’on peut s’en sortir avec de l’aide et du temps.

⚠️ Il n’est en aucun cas question de brusquer la personne pour qu’elle « se bouge ».
L’empathie c’est, avant tout, avancer AVEC et non pas CONTRE la personne.

Une attitude empathique exclue tous les reproches et les « bons » conseils, tels que « Secoue-toi ! », « Bouge-toi un peu au lieu de ruminer », « Fais un effort, c’est juste une question de volonté », « Si j’étais toi, je ferais… », « Tu as tout pour être heureux », etc…
N’oublie jamais que la dépression est une maladie. Il ne te viendrait jamais à l’esprit de demander à une personne atteinte d’une intoxication alimentaire d’arrêter de vomir.

Les effets de ces conseils ou reproches sont contre-productifs. Si la personne n’a pas l’énergie d’y répondre positivement, ils vont accentuer la dévalorisation de soi et le sentiment d’impuissance.
La personne se sentira comme incomprise, elle aura l’impression que sa souffrance n’est ni entendue, ni reconnue.

Ces effets négatifs peuvent alors aggraver la symptomatologie dépressive et peuvent favoriser des idées suicidaires.

——– L’observation de son comportement

Les symptômes de la dépression n’apparaissent, généralement, pas brutalement. Il y a une dégradation progressive de l’état. Mais la personne peut avoir tendance à minimiser l’ampleur de sa souffrance. L’entourage est alors un regard extérieur plus à même de reconnaître l’apparition du trouble dépressif.
L’entourage proche est fréquemment celui qui s’aperçoit que quelque chose ne va pas.

Cette observation porte sur les évolutions du comportement par rapport : 
—- à la personne elle -même : apparence, appétit, sommeil, humeur, etc…
—- aux autres : repli sur soi, irritabilité, baisse ou reprise des sorties, etc…
—- à la vie quotidienne : les tâches domestiques, son envie d’aller travailler ou d’entreprendre des loisirs, etc…

Alors, sois attentif aux évolutions que tu observes.
Mais, ne te contente pas de les penser, parle-en à ton proche que ce soit positif ou négatif. Un retour positif est un encouragement, quand un retour négatif est un signal d’alerte.

Puis, quand votre proche va mieux, laisse-le tranquillement reprendre son rythme et la place qu’il occupait avant la maladie.


Quelle aide proposer ?

——– Proposer des activités et des sorties

Tu peux soutenir ton proche en l’invitant à faire des activités et des sorties ensemble.

Ne te soucie pas si elle refuse tes propositions. Le simple fait de la solliciter lui permet d’exister et de garder sa place. Et puis, peut être, qu’un jour la réponse sera positive, qui sait ?

Mais, attention, il peut être complètement contre-productif de brusquer ton proche en lui proposant sans cesse de faire des choses. Une personne souffrant de dépression se fatigue très vite car elle lutte en permanence contre sa fatigue et ses idées noires.
Il est donc question d’être à l’écoute de ses besoins et de ses envies.

——– L’accompagner dans ses démarches

La maladie implique souvent de nombreuses démarches : arrêt maladie, mi-temps thérapeutique, mutuelle, employeur, etc… Ton proche peut avoir besoin d’un petit coup de main !

Mais il essentiel d’éviter d’être envahissant et de vouloir tout gérer à sa place.
Sinon, elle aura l’impression d’être infantilisée ce qui va accentuer la dévalorisation et la perte d’estime de soi. Je l’ai déjà évoqué, mais là encore, le respect de la « juste distance » est primordial, même si celle-ci peut être difficile à trouver.

——– Lui proposer de consulter un professionnel

Même si les symptômes sont assez bruyants, la personne concernée par la dépression a souvent du mal à les repérer.
Ainsi, si tu observes chez un de tes proches les signes de dépression, il est essentiel que tu l’encourages à consulter. L’entourage ne peux remplacer les soignants pour repérer la dépression mais il joue un rôle de facilitation dans prise de contact avec eux. 

Pour une personne qui souffre de dépression, les choses simples peuvent sembler insurmontables. Il y a souvent un écart entre ce qu’elle accepte de faire et ce qu’elle va réellement faire.
—– ⤳ Si elle est d’accord pour consulter,
———alors il sera peut être nécessaire que tu appelles toi-même pour prendre le rendez-vous.
—– ⤳ Si elle est dans refus total,
———alors n’hésites pas à lui faire part de ton ressenti et de tes inquiétudes.

Au-delà du diagnostic, consulter un professionnel permet de mettre en place une psychothérapie et/ou un traitement médicamenteux.
Ton proche aura alors encore besoin de toi ! Il est nécessaire que tu crois en sa capacité d’aller mieux, même si les résultats peuvent mettre un peu de temps à être visibles.

⚠️ Si tu as des doutes sur la prise en charge, n’hésites pas à contacter le professionnel en question.

L’efficacité d’une prise en charge thérapeutique repose en premier lieu sur la relation.
Si le patient ne se sent pas en confiance avec le professionnel, alors n’hésites pas à lui soumettre l’idée d’en changer. Cela ne remet pas en cause les compétences du médecin ou du psychologue et c’est une décision qui peut être réellement bénéfique pour ton proche.


Et quand cela devient trop difficile, que faire ?

Ton soutien est indispensable mais il demande force et courage.

Il est normal que tu ressentes de la fatigue et du découragement. Avec le temps, ces sentiments risquent d’évoluer en colère et d’avoir un effet négatif sur votre relation. 
Pour cette raison, il est indispensable que tu te préserves !

Quelques conseils pour éviter l’épuisement :
——-Continue d’avoir des activités qui te procurent du plaisir et du bien être, elles te donneront le sourire et la force dont ton proche a besoin.
——-N’oublie pas ta propre souffrance, il peut être nécessaire que tu fasses appel toi aussi à un profession pour te soutenir.
——- Ne prends pas pour toi ce que ton proche dit, il peut prononcer des paroles blessantes, car il est dans une grande souffrance.

Tu n’es pas la solution miracle à la dépression de ton proche !
Garder cette phrase en tête est nécessaire pour ne pas culpabiliser de ton impuissance. Tu ne peux pas avoir une réaction parfaite à chaque fois, tu es et reste humain.

🌸 Cet article propose des pistes de réflexion concernant l’attitude et l’aide à adopter. Mais, il peut être incomplet et ne pas correspondre à certaines situations.
Il serait intéressant, si toi-même tu es dans cette situation, que tu complètes ces propositions dans les commentaires.

« Les mots gentils peuvent être courts et faciles à dire, mais leurs échos sont vraiment infinis. »

Mère Teresa

Bibliographie

Frank Bellivier & Emmanuel HaffenActualités sur les maladies dépressives. Lavoisier, 2018
Michel GoudemandLes états dépressifs. Lavoisier, 2010
https://www.la-depression.org/

En psychologie, qu’est ce que le bonheur ?

La recherche du bonheur est, très souvent, la raison pour laquelle les patients viennent me voir.
Ils veulent « que ça aille mieux », « arrêter de souffrir », « être heureux », etc…

Les ouvrages se multiplient pour nous donner la recette du bonheur. Ils nous donnent des conseils, voire un mode d’emploi, pour nous permettre d’être heureux à 100% et pour toujours.
Freud l’évoque, lui aussi. Il précise que les humains « aspirent au bonheur, ils veulent devenir heureux et le rester »

Chacun veut sa part de bonheur, peu importe ce que cela veut dire, pourvu qu’on en profite ! 

Cette exigence de bonheur est une recherche obsessionnelle de perfection : il FAUT vivre heureux, ou du moins il faut SE MONTRER heureux.

On est tous d’accord sur le mot, tous d’accord pour dire que c’est notre objectif, mais on ne sait pas ce que cela veut dire.
Le bonheur tout le monde en veut mais sans savoir ce que c’est !

« Le bonheur, c’est d’en connaître sa définition pour ne plus le chercher. »

Sonia Lahsaini

Et si on partait de la définition ?

Les dictionnaires définissent le bonheur comme « un état de la conscience pleinement satisfaite ».
Dans cette définition 2 mots sont importants :
——La satisfaction
—— La conscience

La satisfaction

Le bonheur serait lié à la satisfaction de tes besoins.
Ils sont nécessaires et indispensables à la vie.

La catégorisation la plus connue est la pyramide de Maslow qui hiérarchise les besoins :
⤳ les besoins physiologiques : la faim, la soif, le sommeil, etc…
⤳ le besoin de sécurité : financière, physique, morale, psychologique, etc…
⤳ le besoin d’appartenance et d’amour : aimer et être aimé, se sentir entouré, etc…
⤳ le besoin d’estime de soi : la considération, la reconnaissance, etc…
⤳ le besoin de réalisation de soi : exploiter et mettre en valeur son potentiel, se sentir utile, etc…

Ces « petites satisfactions » prises une à une ne sont pas suffisantes mais si tu en es privé alors il sera difficile pour toi d’être pleinement heureux. Ton sentiment de bonheur repose, en partie, sur la multiplication de ces petites satisfactions de tes besoins.
Mais cela ne suffit pas !

Freud évoque cette notion de satisfaction.
Selon lui, l’humain est soumis à une tension interne, source de déplaisir. Pour s’en défaire, il doit satisfaire ses pulsions, ce qui lui fait éprouver du plaisir.

La conscience

Même si tes besoins sont satisfaits, tu peux passer à côté du bonheur toute ta vie !
Être heureux suppose de prendre conscience de l’existence et de l’importance de ces satisfactions lorsqu’elles surviennent.

Si tu n’es pas conscient, tu ne reconnaîtras le bonheur que lorsqu’il ne sera plus là. Cette conscience nous fait donc aussi percevoir que ce bonheur est éphémère.
Une fois que tu le vis, tu souhaites tout faire pour le garder, avec la crainte qu’il ne dure pas.

Pour être heureux, il est donc nécessaire que tu cultives ta conscience, grâce à la gratitude !
Ce n’est pas une faculté innée, tu peux l’entraîner, comme un muscle.

💌 Par exemple, pour prendre conscience de ton bonheur, tu peux tenir un journal de gratitude.
Chaque jour, dans un petit carnet spécial, écris 3 à 5 choses qui te rendent heureux.


Le bonheur n’est pas le plaisir

Chaque propre a sa propre définition du bonheur.
Pour certains, le bonheur renvoie à la stabilité, il s’inscrit forcément dans la durée. Pour d’autres, le bonheur est éphémère, il est composé de courts instants intenses, riches en émotions.

Une solution a ce désaccord serait de différencier le bonheur du plaisir :
—– ⤳ Le plaisir serait une sensation, c’est-à-dire un instant intense mais de courte durée.
—– ⤳ Le bonheur serait un état permanent, moins puissant mais plus durable.

Le bonheur est donc évidemment lié au plaisir mais ne se réduit pas à cela.
En effet, en neurobiologie :
⇨ Le plaisir produit de la dopamine, une hormone addictive
⇨ Le bonheur produit de la sérotonine, une hormone anti-stress
Or, trop de dopamine sature les capteurs de sérotonine, donc trop de plaisir empêcherait l’accès au bonheur.

☝🏻 Le sucre ou la drogue sont de bons exemples !
Leur arrivée dans ton sang produit de la dopamine, elle offre un plaisir instantané mais éphémère.
Ces produits ne te rendent pas plus heureux sur le long terme, bien au contraire…

Pour parvenir au bonheur, ne cours pas après des petits plaisirs inutiles et temporaires, mais lis plutôt la suite de cet article !


Et le malheur alors ?

Une vie heureuse n’est pas une vie sans souffrances, tu as le droit d’être malheureux !
Je dirais même, être malheureux est incontournable ! Le malheur, que tu le veuilles ou non, fait et fera partie ton existence.

Et je vais te donner une raison de t’en réjouir !
Des études ont montré que plus le niveau de bien-être d’une personne est élevé, moins les événements heureux de sa vie contribuent à son bonheur. Quand tu es heureux, ce qui fait ton bonheur devient banal, le positif devient normal.

Un peu comme avec l’argent :
➛ plus tu en as, moins en avoir davantage te rend heureux
➛ moins tu en as, plus une petite somme provoque en toi une grande joie

😜 C’est assez logique en fait !
Lorsque tu es habitué à profiter d’une douche chaude tous les matins, tu ne sautes pas de joie à l’idée de te laver, mis à part lorsque ta chaudière a été en panne 1 semaine.

Les moments de malheurs mettent donc en valeur les moments de ta vie où tu es heureux.

« Le bonheur est un état d’esprit. Il s’agit de la façon dont vous regardez les choses. »

Walt Disney

Le bonheur en psychanalyse

Le bonheur n’est pas un concept psychanalytique mais il fait partie des questions fondamentales de l’être humain donc de nombreux psychanalystes l’évoquent.

Selon Freud, le bonheur comporte, à la fois, un but positif et un but négatif.
Il est dû à :
« un fort sentiment de plaisir »
« une absence de douleur et de déplaisir ».

Pour lui, le monde dans lequel on vit ne se prête pas au bonheur. Hommes et femmes aimeraient une vie uniquement faite de plaisir, mais l’environnement ne s’y prête pas 

Il invite donc chacun à chercher sa formule du bonheur : « il n’y a pas de conseil qui vaille pour tous ; chacun doit essayer de voir lui-même de quelle façon particulière il peut trouver la béatitude ».

Mais, si tu souhaites être heureux, tu ne dois pas chercher le bonheur mais plutôt fuir les souffrances. Il en identifie 3 sources :
——– ⤳ celles provenant du corps
——– ⤳ celles provenant du monde extérieur
——– ⤳ celles provenant des relations aux autres
Le malheur vient de la réalité et des autres.

💡 Le bonheur est donc confronté aux « possibilités de vie » qui viennent le limiter.
En psychanalyse, on dit que le principe de plaisir est limité par le principe de réalité.

Cette conception du bonheur n’est pas tout à fait vérifiée dans la réalité. Il y a beaucoup d’autres moyens d’être heureux qu’en fuyant les souffrances.
Une branche de la psychologie a fait du bonheur son thème de prédilection : La psychologie positive.

« Le bonheur est un rêve d’enfant réalisé dans l’âge adulte. »

Sigmund Freud

Une psychologie du bonheur :
La psychologie positive

La psychologie positive se centre, comme son nom l’indique, sur les émotions positives.
Contrairement à beaucoup d’autres courants de la psychologie qui se centrent sur les pathologies mentales, celui-ci s’intéresse aux gens qui ne sont pas malades mais qui veulent aller mieux.

Elle définit le bonheur comme un trait stable de la personnalité consistant à :
être globalement satisfait de sa vie
éprouver généralement des émotions agréables : joie, espoir, gratitude, etc…
éprouver rarement des émotions négatives : anxiété, jalousie, dépression, etc…

Pour Seligman, une vie heureuse implique une vie qui :
———- ⤳ soit source de plaisir
———- ⤳ ait du sens
———- ⤳ implique que l’individu se sente engagé

Le plaisir

Le plaisir provient des expériences de vie provoquant des émotions et des pensées positives.
Comme tu as déjà pu le lire, le bonheur consiste à multiplier les expériences positives et à minimiser les expériences négatives.

Mais à quoi cela sert si cela n’a pas de sens ?

Le sens

Les moments heureux doivent être intégrés dans une vision de l’existence pleine de sens.

Mettre du sens c’est agir pour réaliser des objectifs individuels ou collectifs.
Tes actions, tes activités, doivent contribuer à quelque chose, à toi-même ou à quelque chose de plus grand que toi.

Les études montrent que le plaisir et le sens se complètent, se renforcent, et même plus, ils sont nécessaires l’un à l’autre :
—-Les émotions positives aident à percevoir le sens de sa vie.
Les sentiments positifs permettent de mieux distinguer ce qui a du sens et ce qui n’en a pas.
—- Donner du sens à sa vie offre plus de chance d’éprouver des émotions positives.
Le sens de la vie permet, face aux difficultés, de retrouver plus facilement un état de calme.

L’engagement

L’engagement est un état de concentration idéal pour accomplir une activité.
Il s’agit de ressentir de l’un intérêt pour ce que tu fais, de t’y plonger pleinement, de repousser tes limites, de te trouver de nouveaux challenges, etc…

Le bonheur vient lorsque tu es vraiment engagé dans ta vie et dans ta relations aux autres.
Cela consiste à être pleinement dans le présent. Pour cela, la méditation de pleine conscience peut te guider.

🌸 Si tu présentes les trois conditions, alors tu as toutes les chances d’avoir une vie pleine de bonheur.

« Le bonheur est en nous, puisqu’en amitié comme en amour on jouit surtout de ce que l’on donne. »

Marie Valyère

Conclusion

Il est possible de « travailler » à son bonheur.

Mais il n’y a pas de recette miracle, pas de mode d’emploi ! Intuitivement, tu sais déjà ce qui est important pour ton bonheur. Il suffit que tu te poses la question de temps en temps.
Le bonheur n’est pas une découverte mais est une prise de conscience.

Au-delà d’une destination à atteindre, le bonheur est un voyage.
En effet, les efforts, les changements, qui mènent au bonheur, sont bénéfiques en eux-mêmes. 

🌺 Des études ont pu montrer que les personnes sur un chemin de développement personnel ont une vie plus belle et plus longue.

Si je dois te donner une réponse à la question posée dans le titre de cet article, je te dirai que le vrai bonheur, c’est de le chercher.


Bibliographie

Bourdin Dominique. « De la saveur du plaisir à l’art d’être heureux ? », Empan, vol. 86, no. 2, 2012, pp. 24-35.
Frydman René & Flis-Trèves Muriel. Recherche bonheur désespérément…Presses Universitaires de France, 2010.
Van Rillaer Jacques. La nouvelle gestion de soi. Ce qu’il faut faire pour vivre mieux. Mardaga, 2012

Pourquoi est-on jaloux ?

Selon un ancien proverbe russe, « la jalousie et l’amour sont des sœurs ».
Mais la réalité est bien plus complexe !

On peut parler de jalousie dans de nombreuses situations, par exemple :
—–⤳ l’envie qui te trotte dans la tête d’aller vérifier le portable de ta moitié,
—–⤳ la petite pointe au coeur que tu ressens face à la réussite d’un ami,
—–⤳ la difficulté à te réjouir quand ton collègue à eu une augmentation, et pas toi.

Il n’y a pas un type de relation humaine épargné par la jalousie.
Ta jalousie peut s’exprimer dans ton couple, mais aussi face aux membres de ta famille, à tes amis ou tes collègues.

Mais qu’est ce qu’est réellement ce sentiment ?
Et d’où vient-il ?

Dans cet article, tu trouveras :
– des précisions sur la définition de la jalousie
– les émotions que tu éprouves lorsque tu es jaloux
– des pistes explicatives sur l’origine de la jalousie


Que veut dire « être jaloux » ?

La jalousie et l’envie

Pour commencer la jalousie n’est pas l’envie :
—-La jalousie est le désir de ne pas perdre quelque chose que tu as déjà.
—-L’envie est le désir d’obtenir quelque chose que tu n’as pas.

✌️ Un petit exemple s’impose !
Lorsque tu as peur que ton copain te quitte pour sa jolie collègue, alors tu éprouves de la jalousie.
Mais, lorsque tu es agacée que ta copine te parle de sa belle histoire d’amour tandis que tu es célibataire, alors tu ressens de l’envie.

L’envie est essentiellement une relation à deux : la personne et ce qu’elle convoite.

La jalousie implique, quant à elle, un triangle relationnel :
—– une personne
—– un partenaire aimé
—–un rival


La jalousie et l’amour

La jalousie est souvent interprétée comme un signe d’amour, mais est-ce vrai ?

Il existe évidemment un lien entre la jalousie et l’amour.
Ces deux sentiments supposent un attachement à l’autre et un engagement dans la relation. Tu ne peux pas les éprouver envers quelqu’un pour qui tu ressens de l’indifférence.
De plus, le socle du sentiment de jalousie est la crainte de perdre la personne aimée au profit de quelqu’un d’autre. C’est pour cela que certains disent que la jalousie est « l’ombre de l’amour ».

Néanmoins, la jalousie peut survenir même en l’absence d’amour, lorsque c’est ton ego qui est menacé. Dans ce cas, la jalousie est plus liée à l’égoïsme qu’à l’amour.
De même, la peur peut ne pas être celle de perdre l’autre au profit de quelqu’un d’autre, ce qui est caractéristique de la jalousie, mais peut être la peur liée à l’estime de toi.

Ainsi, la jalousie n’est pas toujours le témoin de l’amour que tu portes à l’autre mais peut être la preuve du manque d’amour que tu te portes à toi-même.

« La jalousie ? C’est comme le sel sur un steak. Il ne faut pas exagérer mais elle est indispensable. »

Marilyn Monroe

Qu’est-ce qu’« une crise de jalousie » ?

La jalousie peut être :
—–brutale, par une découvert ou une révélation.
—–intuitive, par des doutes qui s’immiscent petit à petit.
Dans tous les cas, elle repose sur une rupture de l’équilibre, il y a un moment de bascule.

Le jaloux perd ses repères et ressent une profonde dévalorisation de lui-même. Cet évènement prend toute la place dans sa tête. L’impensable arrive et ce n’est pas acceptable.  
C’est un effondrement, brutal ou insidieux, de son monde et de lui-même.

Puis, le jaloux se met à l’affût des moindres indices. Il surveille, enquête, ce qui nourrit ses interprétations. Chaque perception ou impression vient confirmer les doutes, et chaque petit événement est extrapolé.

Plusieurs phénomènes coexistent :
—-Le doute mène à la suspicion, puis l’angoisse envahit la relation.
—-Le soupçon nourrit la conviction.
—-L’incertitude crée une inquiétude.

☝🏻 Que les raisons de la crise de jalousie soient réelles ou imaginées, les mécanismes psychologiques sont les mêmes.

« La grande jalousie est l’agonie de l’amour. »

Louis-Philippe de Ségur

Que ressens le « jaloux » ?

La crise de jalousie est, avant tout, un choc émotionnel.
Ce n’est pas une seule émotion mais un état qui regroupe plusieurs émotions. Aucune structure cérébrale ne s’active en particulier lorsque une personne éprouve de la jalousie.

Les 3 émotions principales sont :
—- La colère face à la potentielle trahison
—-La tristesse d’être dans une situation si négative
—-La peur liée à la crainte de perdre l’autre
A l’extrême, ces émotions peuvent devenir de la panique, de la rage et du désespoir.

👩🏻‍🔬 Une étude a pu montrer que les femmes vivraient plus souvent la jalousie sous forme de peur et de tristesse, tandis ce que les hommes la ressentiraient davantage sous forme de colère.
Mais bien sûr, cela reste des statistiques, il ne faut pas tomber dans le stéréotype.

La colère

La colère ressentie est liée à l’injustice perçue.
Ce sentiment d’injustice est associé au combat que la personne pense devoir engager pour lutter contre la perte potentielle.

La colère peut provenir également du désir de vengeance face au partenaire responsable de la trahison.

La tristesse

Le chagrin provient de l’évaluation négative que tu fais de ta vie.
Dans la jalousie, la situation positive dans laquelle la personne était est interrompue. La relation qui avait auparavant de bonnes chances de durer est désormais menacée ou bien terminée.

La tristesse est ressentie quand la personne ne résiste pas à la situation mais reste plutôt dans la passivité. Elle perçoit qu’elle n’a aucun contrôle et donc se résigne face à la situation.

La peur

Une personne amoureuse de son partenaire sera triste si la relation prend fin. Mais si elle fait confiance à son partenaire, alors la perdre au profit d’une autre ne lui semble pas une option possible. Cette personne n’aura pas peur, elle ne sera alors pas jalouse.

La peur provient de la crainte de perdre le lien à l’autre, mais elle peut aussi provenir d’une peur plus profonde :
—- ⤳ la peur de l’abandon
—- ⤳ la peur de l’injustice
—- ⤳ la peur de la trahison
—- ⤳ la peur de l’humiliation
—- ⤳ la peur du rejet
En ce sens, la jalousie renvoie à d’autres peur que simplement celle de perdre l’autre.

La peur dans la jalousie est souvent imaginaire, elle concerne un changement futur.
La jalousie ne cesse généralement pas lorsque la personne obtient des preuves qu’elle se trompe, n’importe quel prétexte suffit pour raviver la peur.

⚠️ Bien que les éléments la peur, la colère et la tristesse sont présents dans la jalousie, dans certaines situations moins intenses, une ou plusieurs de ces émotions peuvent être absentes.

« La jalousie est la preuve que l’amour est semblable à la haine car dans la jalousie, amour et haine se confondent. »

Amos Oz

D’où vient la jalousie ?

La jalousie infantile

La jalousie, pendant la petite enfance, est normale.
Les bébés ont le désir instinctif de tisser des liens sociaux car leur survie dépend des autres. La jalousie pourrait alors être considérée comme une réaction à la présence de quelqu’un qui menace ce lien social.

A cet âge, l’enfant n’a pas réellement des réactions de jalousie, mais il exprime son mécontentement en protestant quand l’adulte s’éloigne physiquement ou ne lui prête pas attention.

👩🏻‍🔬 Une expérience a montré que les bébés se montrent perturbés quand leur mère cajole, devant eux, une poupée dans ses bras.
Le bébé est jaloux de la poupée, la mère est l’objet de rivalité. La perturbation de l’enfant ne vient pas de l’envie de posséder la poupée mais parce qu’il se sent exclu. Il n’est pas l’objet de l’attention de sa mère.

En réalité, la jalousie infantile est plutôt de l’envie, pour deux raisons essentielles :
——- ⇨ La jalousie nécessite que l’enfant développe une représentation mentale de lui-même, c’est-à-dire une auto-représentation. Cette compétence s’acquière entre 15 et 24 mois lorsque l’enfant se reconnaît dans un miroir, utilise des pronoms tels que « je », « moi » ou « le mien ».
——- ⇨ Pour être jaloux, il faut avoir avoir conscience que l’autre oriente intentionnellement son attention vers soi ou vers un autre. Or, cette capacité à percevoir l’objectif qui explique les actions de l’autre ne s’acquière que vers 2 ans.


La jalousie œdipienne

La véritable jalousie n’apparait qu’entre 3 et 6 ans, avec le Complexe d’Œdipe.

C’est à ce moment que l’enfant apprend à être dans une relation à trois : son père, sa mère et lui-même. Et c’est donc le début de la jalousie avec, comme je l’ai déjà abordé :
—–une personne : l’enfant
—– un partenaire aimé : le parent de sexe opposé
—– un rival : le parent du même sexe

A cet âge, l’enfant est en quête de contacts physiques avec son parent de sexe opposé. La petite fille se rapproche de son papa, et le petit garçon de sa maman. La conséquence de ce rapprochement est la concurrence qui s’installe avec le parent du même sexe. L’enfant perçoit l’autre parent comme un rival.

⚠️ Le complexe d’Œdipe est bien plus compliqué que ça !
Je l’ai volontairement simplifié ici pour faciliter la compréhension de l’idée principale.

Le complexe d’Œdipe est un moment charnière, durant lequel se décide l’avenir de l’amour, et donc de la jalousie, sous sa forme adulte.


La jalousie fraternelle

En plus de cette relation aux figures parentales, une autre participe à l’élaboration de la jalousie : la relation entre frères et soeurs.
En effet, le lien fraternel peut être, plus ou moins, marqué par l’opposition ou la coopération.

Les conflits, et donc la jalousie, peuvent être liés, entre autres :
—–au rang de chacun dans la fratrie,
—–à la place de chacun dans l’histoire familiale,
—– ⤳ aux préférences parentales.

En outre, les conflits parentaux ont des conséquences sur les liens entre les enfants. Ils peuvent renforcer le sentiment de rejet ou d’abandon qu’éprouvent certains enfants de la fratrie. 

Ainsi, la fratrie mobilise des sentiments ambivalents, de rivalité et d’amour, qui sont les fondement de la jalousie. 

🌺 Pour conclure, le dépassement des jalousies œdipiennes et fraternelles permet de se confronter aux situations de jalousie à l’âge adulte.


Bibliographie

Hart Sybil & Maria LegersteeHandbook of Jealousy : Theory, Research, and Multidisciplinary Approaches. Wiley-Blackwell, 2010.
Pasini Willy & Jacqueline HenryLa jalousie. O. Jacob, 2004.
Raoult Patrick-AngeComprendre et soigner la jalousie. Dunod, 2017.

L’autoanalyse, peut-on s’analyser seul ?

L’autoanalyse renvoie à la psychanalyse, elle repose sur le postulat de l’inconscient.
Si Freud n’avait pas pratiqué lui-même cette technique pour découvrir et analyser les productions de son inconscient, alors la psychanalyse n’aurait jamais existé.
Tu en sauras plus sur ce point à la fin de cet article…

✌️ Mais rassure-toi, on est bien loin du psychanalyste, de son divan et de ses fameux « hum hum »

La psychanalyse repose sur l’idée que le traitement des troubles psychiques est permis par la profonde connaissance de soi.
Et, c’est sur ce modèle que se base toute thérapie d’aspiration psychanalytique.

L’autoanalyse désigne ainsi « l’investigation de soi par soi », il s’agit de s’engager dans l’aventure de la connaissance de soi par ses propres moyens.

Beaucoup d’entre nous, particulièrement ceux intéressés par la psychologie, souhaitent aboutir à une meilleur connaissance d’eux-mêmes. Cette recherche de connaissance à propos de soi remonte aux philosophes grecs, entre autres Socrate et Platon, avec leur célèbre « gnothi seauton » : « connais-toi toi-même ».

« Qui donc souffre ? Celui qui ne se connaît pas. »

Swami Prajnanpad

L’autoanalyse, qu’est ce que c’est ?

A qui cela s’adresse-t-il ?

L’autoanalyse est envisageable pour tous et peut te permettre d’aller mieux, à quelques conditions près !

La première est de garder à l’esprit que tu es le personnage principal de ta vie.
Cette phrase permet de développer ton empowerment, c’est-à-dire ton sentiment de contrôle sur ta vie. Cela a un effet sur ton estime de soi, ta confiance en soi ainsi que ta capacité d’initiative.
Mais si tes difficultés sont ancrées depuis longtemps et qu’elles provoquent une souffrance, alors il peut t’être difficile de croire en cette phrase. L’aide d’un professionnel de santé mental peut alors t’être précieuse. C’est une phrase que je prononce souvent face à mes patients !

La deuxième est que tu ne souffres pas d’un souci d’ordre pathologique.
En cas de trouble psychiatrique, l’intervention d’un professionnel est nécessaire, afin de faire intervenir un autre discours dans ton analyse.

La troisième est que ta motivation à t’autoanalyser soit solide afin de résister aux imprévus et aux aléas de ta vie.
En effet, cela demande de l’énergie et du temps, dans les moments où tu vas bien, où tu as le temps, mais également dans les moments où tu vas moins bien et où tu es débordé. Il n’est pas nécessaire de t’obliger à des rendez-vous fixes et réguliers mais une certaine continuité est nécessaire.

La quatrième est que tu prennes en compte l’existence de ton inconscient et que tu te questionnes en permanence sur son action.
Il se manifeste de façon imprévisible, en fonction de ton histoire propre, à travers tes rêves, tes oublis, tes lapsus, etc…

Cela implique :
—- ⤳ de ne pas te centrer uniquement sur tes bonnes actions ou tes bonnes pensées.
——–Les réponses que tu cherches se cachent souvent dans ce qui fait tâche dans ton comportement.
—- ⤳ de considérer les événements qui te touchent plus que les autres ou plus qu’ils ne le devraient.
——–Tu y trouves l’occasion de mieux te comprendre.
Ta remise en question doit être permanente !

La cinquième est qu’il est nécessaire de ne pas t’isoler.
Que tu te réserves des moments de retrait, c’est une chose, mais ne te coupes pas du monde qui t’entoure. C’est dans ton rapport au monde, dans tes relations aux autres, que ton psychisme réagit.

La sixième est que tu sois prêt à consulter un professionnel si cela est nécessaire, c’est-à-dire si tes difficultés sont trop profondes pour que tu en viennes à bout seul.


A quoi ça sert ?

L’autoanalyse peut te permettre de percer les secrets de ta psyché et les conséquences que celle-ci a sur ta vie. Cet effet est permis par la compréhension de l’origine de tes blocages et de tes échecs.

👉🏼 Cela est d’autant plus valable si tu travailles dans le secteur du soin ou de l’éducation.
Ce sont des domaines dans lesquels ton inconscient est fortement sollicité, faire un petit point sur son influence peut donc t’apporter de grands bénéfices !

Cette pratique a également des effets sur tes relations aux autres.
La connaissance de l’inconscient et de ses mécanismes, te permet une certaine ouverture d’esprit. En cherchant réellement à comprendre les autres, alors tu te sens plus proche d’eux. Tu ne les juges plus dans leurs opinions ou leurs actions mais tu apprends à les comprendre. En somme, tu développes ta compassion.
Comment aimer ou aider les autres si tu ne t’ouvres pas à l’inconnu en eux grâce au travail sur toi ?

Ces connaissances que tu acquiers sur toi-même, te permettent alors d’en apprendre davantage sur le fonctionnement psychologique. Au-delà des savoirs que tu peux trouver dans les théories, là tu apprends par l’expérience de toi-même.
Tu peux alors découvrir que l’inconscient fonctionne selon des lois différentes de celles du cerveau.
Malgré les avancées scientifiques, la science ne peut pas encore tout expliquer !


Comment faire ?

Cette pratique peut se faire à n’importe quel moment : en marchant, en faisant du sport, sous la douche, avant de t’endormir, etc…
Mais, la technique recommandée et la plus fréquemment utilisée est l’écriture. Elle te permet de revoir tes notes après coup.

Selon Horney, pour que cela fonctionne, il est nécessaire de développer une véritable capacité à jouer à la fois le rôle de l’analyste et celui de l’analysé.

Le premier pas de l’autoanalyse est de recueillir :
——–tes souvenirs, aussi gênants soient-ils,
——– tes sentiments, aussi contradictoires soient-ils,
——–tes pensées, même les plus farfelues,
——– tes hypothèses, même les plus étranges.
Tout cela, en te rendant compte que ton inconscient existe et qu’il a une action, à chaque moment de ta vie. Il est nécessaire que tu portes une attention particulière aux rêves, aux actes manqués, aux bizarreries, aux contradictions, que tu as tendance à banaliser.

Puis, une fois ces éléments mis à l’écrit, il est question de décomposer, examiner, décortiquer.
Le but est de déconstruire tes idées préconçues, afin de faciliter l’apparition de l’inconnu qui est en toi.

Laisser apparaitre l’inconnu en toi revient à découvrir tes tendances cachées.
Tu peux alors prendre conscience que ces tendances sont incohérentes, elles vont dans des directions différentes. L’apparente cohérence de tes actions et de tes pensées n’est qu’une façade, camouflant une ribambelle de mouvements contradictoires.

☝🏻 Ecrire simplement ce que tu penses, te souviens, ou ce que tu as fait ne suffit pas.
Le simple récit permet d’extérioriser ton vécu, mais ce soulagement est ponctuel, temporaire, toujours à recommencer.
Le pouvoir de l’autoanalyse se trouve, justement, dans l’analyse !

S’autoanalyser, ne s’apparente donc pas à :
—- Raconter ta vie, comme dans un journal intime,
—-Interpréter tes oublis, tes lapsus ou tes rêves à partir de significations toutes trouvées,
—- Trouver une logique évidente et univoque à ton fonctionnement psychique.

En effet, l’autoanalyse vise non seulement à découvrir quelque chose d’inconnu en toi-même et mais également à accéder à une interprétation.
Interpréter implique ici de faire se rejoindre tes mouvements contraires, de les laisser coexister sans chercher à les concilier.

Cela peut parfois t’amener à trouver des explications et une certaine cohérence. `Mais ces explications ne sont ni exhaustives, ni définitives. Elles sont toujours incomplètes et à remettre en question.
Que certaines te conviennent davantage est normal, mais n’oublie jamais qu’il en existe toujours d’autres.

L’autoanalyse repose donc sur :
——la réflexivité, tu te prends toi-même comme sujet d’analyse, comme devant un miroir, cela consiste à t’observer, à t’examiner, tel que tu es, sous toutes les coutures.
—— la créativité, le but n’est pas tourner en rond, mais plutôt de cultiver ton esprit critique.
——l’auto-organisation, le but ultime est une désorganisation puis une réorganisation.

🌸 Avec cette pratique, tu ne risques pas de perturbations psychiques particulières.
Mais cela sous-entend que tu ne pourras pas aller aussi loin qu’avec un psychologue.
Ainsi, lorsque tu as a l’impression d’être bloqué dans ton parcours de connaissance de toi, et si tu souhaites le poursuivre, alors cela peut être une bonne idée de te tourner vers un professionnel.

« Prends le temps de te retrouver avec toi-même tous les jours. »

Robin Casarjian

Pour aller plus loin…
L’autoanalyse dans l’histoire freudienne

Je te disais un peu plus haut que Freud, lui-même, avait commencé par sa propre analyse.

💡 Dans le traitement des névrosés, il constate que son statut de neurologue ne lui sert pratiquement à rien.
Cela lui apparaît comme évident lorsqu’il étudie les rêves, les oublis, les lapsus, etc… Il place alors ces manifestations au centre de sa théorie. Selon lui, elles relèvent d’un fonctionnement psychique inconscient, différent du fonctionnement neurologique.

Il était donc déjà convaincu de l’existence de l’inconscient et souhaitait en repérer l’action en analysant ses rêves et ses actes manqués.
Il souhaite alors en obtenir un effet thérapeutique mais également en obtenir une compréhension des mécanismes à l’oeuvre dans l’inconscient.

À cette période, il se révèle réellement fasciné par l’autoanalyse. Puis, par la suite, sa position devient plus ambiguë. Il prend conscience des limites de sa méthode. Lui-même arrive à des impasses.
Selon lui, l’autoanalyse à proprement parlé n’est pas possible, sinon la maladie mentale n’existerait pas.

Il n’y renonce pas pour autant !
Il poursuit son autoanalyse, même lorsque celle-ci ne le satisfait pas. Il a d’ailleurs appelé cette période, de 1897 à 1898, sa « chronique merdologique ».

Puis, il s’aperçoit de la nécessité pour lui de se soumettre à une analyse par quelqu’un d’autre que lui même. À ce moment, il fait de l’autoanalyse et du suivi par un autre analyste, les conditions indispensables pour devenir soi-même psychanalyste.

En tant qu’analyste, vis-à-vis des manifestations de son inconscient, il adopte une attitude de réceptivité. Pour cela, il facilite les conditions permettant leur émergence.
Il ne va pas à l’inconscient, c’est l’inconscient qui vient à lui.

Ainsi, pour qualifier l’ensemble de ses méthodes, Freud emploie le terme « psychanalyse ».

« La psychanalyse est la mise en question du psychanalyste. »

Jacques Lacan

Conclusion

L’autoanalyse est un sujet très complexe…

Je t’ai expliqué les bénéfices qu’elle permet dans la connaissance de soi.
Par l’intermédiaire de ton inconscient, elle te permet de comprendre tes propres contradictions. Mais ton inconscient n’est pas réellement accessible, tu n’as accès qu’à une infime partie à travers tes rêves, tes lapsus ou tes oublis.

Ainsi, l’autoanalyse comporte également de nombreuses limites.

Ses bénéfices ne sont pas comparables à ceux obtenus à la suite d’une réelle psychanalyse. Néanmoins, elle est tout de même, très fréquemment, associée à une thérapie sur le divan avec un psychanalyste.
Les deux ne sont pas antinomiques mais se peuvent se compléter.

⚠️ Cet article a pour but de t’initier à cette méthode.
Avant de pratiquer l’autoanalyse, je te conseille donc de jeter un coup d’œil à la bibliographie. Tu y trouveras des ouvrages qui te donneront des informations plus précises sur la méthode à employer.


Bibliographie

Bonnet GérardL’autoanalyse. Presses Universitaires de France, 2018
Bonnet GérardL’auto-psychanalyse : Oubli, lapsus, perte d’objets. Éditions In Press, 2016.
Horney KarenL’auto-analyse. Stock, 1993.
Kaës RenéPenser l’inconscient. Développements de l’oeuvre de Didier Anzieu. Dunod, 2011

La méditation de pleine conscience a-t-elle de réels bienfaits psychologiques ?

La méditation est la nouvelle activité en vogue, qu’il est bien vu de pratiquer.

🌸 De nombreux articles et formations expliquent déjà ce qu’est la méditation de pleine conscience et comment la pratiquer. Ces sources d’informations sont fournies par des professionnels de ce domaine, ce qui n’est pas mon cas.
Dans cet article, tu trouveras plutôt mon point de vue de psychologue sur l’intérêt psychologique d’intégrer la méditation à son quotidien.

Cette technique ancestrale, spirituelle, voire religieuse, est aujourd’hui démocratisée. Elle n’est plus présentée selon son origine bouddhique mais comme une technique laïque, étudiée dans les plus grandes universités, par les plus grands chercheurs.

Simple et gratuite, elle promet de trouver la voie du bonheur en investissant le minimum d’énergie et de temps.
Elle agirait sur la réduction du stress, sur l’amélioration du sommeil, sur nos comportements, sur nos capacités d’apprentissage, sur même sur la qualité de nos relations avec les autres, etc…

Mais la méditation a-t-elle vraiment un effet psychologique ?

« Ne pas avoir le temps de méditer, c’est n’avoir pas le temps de regarder son chemin, tout occupé à sa marche. »

Antonin Sertillanges

La neuropsychologie de la méditation

Aujourd’hui, il n’existe pas une explication unique permettant la compréhension des mécanismes en jeu dans la pratique de la méditation de pleine conscience. Mais les études réalisées sont suffisamment approfondies pour retenir notre attention.
Les neurosciences, grâce à l’imagerie cérébrale, mènent les recherches les plus fertiles dans ce domaine.

Quels phénomènes opèrent dans notre cerveau et dans notre esprit lorsque nous méditons ? 

La métacognition

La métacognition désigne la « connaissance de la connaissance ». Il s’agit de ce que tu connais de tes fonctionnements cognitifs et de tes capacités. Ainsi, tu disposes un savoir sur ce que tu sais, ce que tu penses et ce que tu ressens.

La conscience métacognitive est la capacité à se décentrer de ses pensées et de ses émotions. Elle permet de réaliser qu’elles ne te définissent pas, qu’elles ne sont que transitoires et qu’elles ne sont pas le reflet exact de la réalité.

Elle repose notamment sur :
—–la régulation de l’attention
—– la gestion des émotions
—– l’expérience de soi

« Méditez et vous comprendrez. »

Proverbe Oriental

La régulation attentionnelle

L’attention désigne notre capacité à sélectionner les informations perçues en fonction de l’intérêt que nous y portons.
Ces informations peuvent provenir :
⇨ du monde extérieur, on parle alors d’attention sélective.
⇨ du monde intérieur, on parle alors d’attention exécutive.

Pour exercer ton attention, il est nécessaire de demander à ton esprit d’être attentif à une cible. Mais l’attention est labile. Une pensée ou une perception suffit à te distraire. Ton esprit vagabonde !
Pour poursuivre l’exercice de ton attention, tu dois donc la réorienter vers la cible choisie initialement.

C’est exactement le processus mis en oeuvre dans la méditation, à savoir prendre conscience que ton esprit est ailleurs et revenir, sans critiquer ce vagabondage, vers l’objet de la pratique.

🧠 Lors de la méditation, les structures cérébrales impliquées dans le contrôle de l’attention s’activent : le cortex cingulaire antérieur, le cortex préfrontal et le striatum.

La pratique régulière de la méditation est donc associée à une amélioration globale du système attentionnel.
En méditant, tu seras capable :
—–d’orienter ton attention vers un élément que tu estimes prioritaire
—–de maintenir ton attention plus facilement sur cet élément
—– d’être plus flexible pour réorienter ton attention, si cela est nécessaire


La gestion émotionnelle

Les émotions sont à une réponse physiologique et comportementale du système nerveux à un stimulus. Elles ont pour but la survie de l’espèce et font partie depuis bien longtemps de l’évolution de l’Homme.
La plupart du temps, tu es capable de réguler tes émotions, d’influencer le moment de leur apparition et ta manière de les exprimer.

Néanmoins, dans certaines circonstances, chacun présente une sensibilité accrue. Les émotions sont alors d’une grande intensité et ont du mal à s’apaiser. Cela mène à des réactions disproportionnées et à des conséquences négatives pour soi-même ou les autres.
Cela peut nous arriver à tous, sans pour autant que cela soit qualifié de pathologique.

La méditation de pleine conscience facilite alors la régulation émotionnelle, grâce à l’accueil des émotions, sans jugement.
Cela favorise la mise en place d’une réponse différente, moins marquée affectivement. On observe une diminution de :
—- L’intensité de l’émotion
—-La durée de l’émotion
—- La rumination mentale
En somme, la réaction émotionnelle est amoindrie.

La souffrance émotionnelle résulte, bien souvent, davantage de la non-acceptation de l’émotion que de l’émotion en elle-même. La méditation de pleine conscience te permet alors d’accepter les expériences agréables et désagréables sans chercher à prolonger les premières ou à éviter les secondes.

🧠 Au niveau cérébral, les structures impliquées dans la régulation des émotions sont stimulées : le cortex préfrontal et les aires limbiques comme l’amygdale.

Durant la méditation, l’observation des émotions avec une attitude bienveillante permet une moindre réactivité à tes émotions, grâce à trois processus mentaux :
l’observation de tes émotions
l’identification de tes émotions
la prise de distance par rapport à tes émotions
Il t’est alors permis d’envisager tes émotions et tes pensées comme des événements mentaux auxquels tu ne t’identifies pas.

La méditation de pleine conscience modifie donc le vécu de nos émotions, en particulier négatives, en diminuant notre réactivité et en favorisant un retour plus rapide à la normale.


L’expérience de soi

Chacun de nous souhaite « mieux se connaître ». Cela nécessite de s’écouter, de s’observer, de prendre le temps de la rencontre avec soi-même. C’est ce que l’on appelle « faire l’expérience de soi ».
Mais cela n’est pas toujours facile, nous sommes sous l’influence de l’avis des autres, des stéréotypes, de ce qu’il est bien vu de penser ou bien de sentir.

Alors, comment faire ?

Dans la méditation de pleine conscience, tu adoptes une attitude curieuse pour découvrir où ton esprit va lorsqu’il vagabonde.
Le but visé n’est pas de changer ce que tu penses ou ce que tu ressens, mais bien d’accueillir toutes tes pensées, tes sentiments, tes sensations comme importantes à considérer et à observer.

Le maître mot est l’acceptation de chaque moment de ton expérience.
Cela nécessite de prendre consciemment la décision d’être ouvert et réceptif à ce qui te passe par la tête lorsque tu médites.

Cette curiosité et cette acceptation t’amènent à :
—- ⤳ cesser de vouloir éviter certains aspects de ta vie
—- ⤳ changer ta manière d’appréhender les aspects négatifs de ta vie
Cesser de réagir de manière automatique ou de juger sans cesse ce que tu penses ou ce que tu ressens te permets une auto-observation minutieuse et attentive. Ainsi, la méditation de pleine conscience t’ouvre la voie de l’expérience de soi et la possibilité de réagir différemment.

🧠 Des études ont montré que les zones cérébrales impliquées dans l’expérience de soi sont impliquées lors de la méditation : le cortex préfrontal médian, le cortex cingulaire postérieur et l’insula.

En somme, la méditation offre une meilleure expérience de soi grâce à l’adoption d’un état d’esprit ouvert, curieux, fondé sur l’acceptation et le non-jugement. Elle te permet donc de mieux comprendre la nature de ton esprit, de tes pensées et de tes sentiments.

« C’est incroyable comme la vie devient belle quand on prend un moment pour s’arrêter. »

Anonyme

La plasticité cérébrale

La méditation de pleine conscience peut mener à des réaménagements cérébraux grâce à la neuroplasticité cérébrale. Le vécu et l’entrainement façonnent quotidiennement notre cerveau, de deux manières :
—– ⤳ par la création de nouveaux neurones : modifications structurelles
—– ⤳ par l’apparition de nouvelles connexions entre les neurones : modifications fonctionnelles
Cela n’est pas spécifique à la méditation, mais est valable pour toutes les activités pratiquées de manière répétée.

Cette notion de répétition est primordiale.
En effet, la fréquence et l’ancienneté de la pratique méditative sont absolument corrélées à l’ampleur des modifications neurologiques.

La méditation, au-delà d’un moment particulier que l’on s’offre à soi, est un état d’esprit à adopter au quotidien, dont le maître mot est la pleine conscience.
Il s’agit de vivre pleinement l’instant présent, que ce soit d’observer un paysage, de prendre sa douche, d’un moment en famille, d’une marche dans la nature, etc… Il est question d’être simplement et pleinement là.


A venir…
Quels bienfaits la méditation a-t-elle sur la santé mentale ?
La méditation, une pratique essentielle pour les psychologues 


Bibliographie

Bishop Scott et al. Mindfulness : A Proposed Operational Definition. Clinical Psychology : Science and Practice, vol. 11, no 3, 2006, p. 230‑41.
Isnard Bagnis CorinneLa méditation de pleine conscience. Presses Universitaires de France, 2017
Isnard Bagnis CorinneLa pleine conscience au service de la relation de soin. Méditer pour mieux soigner. De Boeck Supérieur, 2017
Midal FabriceLa méditation. Presses Universitaires de France, 2017
Ngô Thanh-Lan. Revue des effets de la méditation de pleine conscience sur la santé mentale et physique et sur ses mécanismes d’action. Santé mentale au Québec, vol. 38, no 2, 2014, p. 19‑34

La dépendance affective est-elle une maladie ?

Qu’est ce que la dépendance affective ?

Elle n’apparait dans aucune classification médicale, pourtant ce terme est largement employé et de nombreuses personnes sont persuadées d’en souffrir.
Dans cet article, tu vas enfin découvrir ce qui se cache réellement sous ce terme.

Des dizaines de questionnaires existent pour « diagnostiquer » la dépendance affective, ce n’est pas ce que tu vas trouver ici.
Dans cet article, je vais te livrer mon point de vue de psychologue sur les causes psychologiques, la gravité, le diagnostic et sur les différents types de dépendance affective.


D’où vient la dépendance affective ?

Un petit détour par l’histoire

☝🏻 Au 13ème siècle, Frédéric II réalisa une expérience pour connaître la « Langue de Dieu ». Il confia six bébés à des nourrices et leur demanda de veiller à leur alimentation, leur sommeil et leur hygiène. Mais, il exigea que jamais elle ne leur parle, afin de laisser le langage venir naturellement à eux.
L’expérience échoua, les bébés finirent par mourir.

Cette expérience, à l’éthique douteuse, nous apprend que les bébés ont besoin de lien social pour survivre. La nourriture et le sommeil ne suffisent pas. La relation aux autres est un élément indispensable à la vie. Nous avons besoin les uns des autres mais également de savoir que nous sommes aimés.

Depuis notre enfance, nous avons des besoins physiques et des besoins affectifs.
Ainsi, nous sommes tous des dépendants affectifs dès la naissance. Il s’agit d’un phénomène normal.

« L’homme est un être social, la nature l’a fait pour vivre avec ses semblables »

Aristote

L’avis psy

On appelle ce besoin affectif, l’attachement : c’est le sentiment d’affection qui lie fortement à quelqu’un et qui apporte un sentiment de sécurité.

Dès la naissance, un bébé est fragile et vulnérable. Il dépend de son environnement pour survivre, et en particulier des adultes. Il ne peut subvenir à ses besoins et ne peut donc prendre soin de lui seul.
Ce n’est pas le cas dans toutes les espèces animales, on parle de néoténie du bébé humain.

Dans ses relations aux adultes, le bébé apprend donc dès la naissance ce qu’il peut attendre ou non des autres :
⇨ Si les relations avec l’adulte sont adaptées, l’enfant va se sentir aimé et digne d’attention, il va alors apprendre à s’aimer lui-même. Cela lui offre une sécurité affective.
⇨ Si les relations avec l’adulte sont inadaptées, en excès ou en défaut, alors l’enfant va soit éviter toute relation, soit se lancer dans une quête perpétuelle d’attention et d’amour. Il se trouve alors dans une insécurité affective.

Le lien d’attachement mis en place dans les premières années de vie va ensuite être intériorisé, il sert de modèle pour toutes les autres relations à l’âge adulte. On appelle cela des modèles internes opérants.
Pour Bowlby, les comportements d’attachement et d’exploration sont complémentaires. Il faut se sentir sécurisé pour pouvoir s’autoriser à découvrir. L’attachement a donc une fonction de protection et une fonction d’exploration.  

Lorsqu’une personne est insécure affectivement, alors elle peut rechercher à l’extérieur l’amour et la confiance qu’elle ne trouve pas en elle. Dans ce cas, on peut parler de dépendance affective.
Les relations amoureuses et amicales viennent combler un BESOIN et non une ENVIE. Elles sont indispensables à l’équilibre et au sentiment de sécurité de la personne dépendante.

L’attachement et la dépendance permettent d’être en lien avec une autre personne mais ce n’est pas la même chose :
——–L’attachement n’empêche pas le détachement et offre même une certaine confiance qui facilite l’exploration du monde.
——– La dépendance est un « accrochage » qui limite cette découverte du monde.

Comment faire la différence entre « être attaché » et « être dépendant » ?


Et si c’était une question d’angoisse de séparation ?

La différence entre attachement et dépendance peut être comprise à travers le prisme de l’angoisse de séparation.
De nombreuses études ont montré cette association entre l’angoisse de séparation de l’enfance et dépendance affective à l’âge adulte. Ainsi, lorsque l’on est dépendant affectif, on a de grandes chances d’avoir ressenti une forte angoisse de séparation étant enfant.

⚠️ Une association entre deux phénomènes ne veut pas dire que l’un cause l’autre.
Ce n’est pas un lien de causalité.

Mais qu’est ce que l’angoisse de séparation ?
C’est un phénomène universel, une émotion du quotidien que chacun d’entre nous éprouve.

Toutes les personnes qui t’entourent pensent elles aussi « Cet ami me manque » « Je me réjouis de revoir ma famille » « Je suis inquiet de ne pas avoir de nouvelles de Paul ».
Nous sommes tous tristes à l’idée de quitter une personne que l’on aime.

D’où vient ce sentiment ?

Dans ses premiers mois de vie, un bébé sourit a toutes les personnes qu’il croise. Il accepte les bisous et les câlins, même de tante Odile avec sa barbe qui pique !

Mais, aux allentours du 8ème mois, il reste collé à papa et maman et refuse d’aller dans les bras des inconnus. Il pleure quand ses parents le déposent à la crèche. Qu’est ce qui s’est passé ?
Eh bien, c’est ça l’angoisse de séparation ! Et elle est normale ! Elle est même nécessaire au bon développement d’un enfant. Il est alors capable de reconnaître les personnes qu’il connaît et de les différencier des inconnus.

Puis, petit à petit, il devient autonome.
Il apprend que ses parents s’éloignent puis reviennent. Il pleure quand ils le laissent mais se remet à sourire et à jouer après un certain temps. Si cela dure trop longtemps, ses parents lui manquent, alors il ressent de nouveau cette angoisse de séparation.

Et à l’âge adulte alors ?

Tu ressens, toi aussi, ce sentiment douloureux d’être seul, triste ou abandonné quand le temps loin de tes proches dure trop longtemps. Ceci est un manque affectif.

Mais ce n’est pas QUE négatif !
Cela te permet de prendre conscience que le lien qui t’unis aux autres est infiniment précieux. Dans la solitude, tu comprends alors les autres et vos relations sont uniques, mais surtout que TU ES UNIQUE.

« Le manque est la lumière donnée à tous. »

Christian Bobin

Ce manque est essentiel au fait de sentir toi !


Comment l’angoisse de séparation excessive créé-t-elle la dépendance affective ?

L’angoisse de séparation de l’enfance devient excessive si elle ne disparait pas. Elle perdure lors de séparations avec les personnes auxquelles tu es attaché. Tu as une peur paralysante de te retrouver seul et abandonné.
Cette peur peut même aller jusqu’à des manifestations psychiques telles que la dépression.

L’angoisse de séparation excessive est une émotion douloureuse lorsque tu prends conscience que les relations humaines, l’existence d’autrui et que ta propre existence sont éphémères.

« Un seul être vous manque, et tout est dépeuplé » 

Lamartine

On peut alors parler de dépendance affective lorsque :
—-tu penses que tu ne peux pas vivre sans la personne,
—- tu penses que ta vie n’a aucune valeur si tu es seule,
—- tu penses que tu ne mérites pas d’être aimée,
—- tu as un besoin excessif que l’on te dise que l’on tient à toi.
Les relations viennent combler un besoin et un manque interne.


Le diagnostic de dépendance affective

La dépendance affective n’est pas forcément une maladie ! C’est une « manière d’être au monde ».
C’est une stratégie inadaptée pour combler son manque d’amour de soi.

La dépendance

La dépendance est un terme complexe. Elle est utilisée aussi bien pour parler de la perte d’autonomie des personnes âgées que de l’addiction aux relations, au sexe, au sport, à la nourriture, aux drogues, à l’alcool, aux jeux, etc…
En bref, la dépendance c’est combler un manque interne par le recours à quelque chose d’externe.

Sous toutes ces dépendances se cache une angoisse de séparation excessive. Pour maitriser le manque de l’autre et de son amour, le dépendant recherche des satisfactions immédiates dans les relations, les substances psychoactives, le jeu, etc…

La dépendance affective

Cette dépendance particulière présente 2 dimensions :
—– ⤳ La personne a besoin d’être rassurée et soutenue son entourage
—– ⤳ La personne a peur de perdre le lien à l’autre

La marge entre normal et pathologique est étroite.
Dans la dépendance normale, la personne est capable d’exister par elle-même et d’avoir d’autres centres d’intérêt. Dans la dépendance pathologique, la personne a perdu cette liberté, la relation lui est vitale. Il n’y a pas vraiment d’amour, la dépendance prend toute la place. 

La limite entre normal et pathologique est une question de flexibilité, de souplesse et de facultés d’adaptation.
Il s’agit de trouver des dépendances variées et socialement adaptées mais également de faire avec les doutes et les échecs pour évoluer vers la connaissance de soi-même et de ses forces.

☝🏻 Les types de dépendance affective :
——— – La dépendance à un type de relation amoureuse quelque soit la personne,
——— – La dépendance à une personne en particulier,
——— – La dépendance sexuelle.

La dépendance affective n’est pas un trouble mental en tant que tel, mais elle peut être inclue à un diagnostic psychiatrique.
Elle peut être présente dans le trouble de la personnalité dépendante lorsque :
—- ⤳ elle en excès,
—- ⤳ elle est permanente dans le fonctionnement psychique,
—- ⤳ elle entraine une souffrance, qu’elle soit sociale, professionnelle et/ou personnelle.

Le trouble de la personnalité dépendante

Ce trouble se caractérise par :
—————un besoin permanent et excessif d’être aimé,
—————une soumission dont le but est de renforcer le lien à l’autre.
Ces attitudes sont présentes dans le couple, mais aussi avec les proches, les amis, la famille ou encore les collègues de travail.

La personnalité dépendante comporte 4 dimensions :
La cognition : « je suis faible et vulnérable »,
Les émotions : « j’ai peur que l’on me juge », « j’ai peur que l’on m’abandonne »,
Le comportement : « je fais tout pour ne pas être rejeté »,
La motivation : « je souhaite être aidé et protégé ».

📈 Entre 0,3 et 9% de la population souffre du trouble de la personnalité dépendante.

On retrouve les critères diagnostics de ce trouble dans le DSM-V, une classification médicale officielle des troubles mentaux.


Bibliographie

Barbey-Mintz et alL’attachement, de la dépendance à l’autonomie. Illustrations pratiques. ERES, 2017
Bornstein Robert. The Dependent Patient. APA, 2005.
Chabert Catherine. Les séparations. Victoires et catastrophes. ERES, 2013
Guelfi Julien-Daniel, Patrick Hardy. Les personnalités pathologiques. Lavoisier, 2013
Poudat François-Xavier. La Dépendance amoureuse : Quand le sexe et l’amour deviennent des drogues. JACOB, 2005.
Quinodo Jean-Michel. La solitude apprivoisée. L’angoisse de séparation en psychanalyse. Presses Universitaires de France, 2010
Tenenbaum Sylvie. Vaincre la dépendance affective. Albin Michel, 2010.
Versaevel Christophe« Personnalité dépendante et dépendance affective : stratégies psychothérapeutiques ». L’Encéphale, vol. 38, no 2, 2012, p. 170‑78.

La visualisation créatrice : un outil puissant !

La visualisation créatrice est un outil de développement personnel dont on entend beaucoup parler ces derniers temps.
Moi-même je la pratique régulièrement et en observe les résultats.

Bien loin d’être magique, la visualisation fait appel à de véritables mécanismes cérébraux et psychologiques.
Mon but avec cet article est de t’apporter des connaissances précises à ce sujet et de te donner des pistes pour toi-même commencer à la pratiquer.

Psychologiquement, comment fonctionne la visualisation ?

La méthode Coué, créée au XXème siècle et issue de l’hypnose thérapeutique, s’inspire des principes de la visualisation.
Elle définit l’autosuggestion comme « l’implantation d’une idée en soi-même, par soi-même ».

Avec sa méthode, Emile Coué souhaitait guérir ses patients en leur demandant de se répéter quotidiennement à voix haute « aujourd’hui, je vais bien, et chaque jour, je vais de mieux en mieux », tout en se l’imaginant réellement. Et si, malgré cela, les patients ressentaient une douleur, physique ou psychique, alors ils devaient formuler « ça passe, ça passe ».

⚡️ En France, cette méthode a été rejetée, car considérée comme ridicule.
Mais ce n’est pas le cas dans de le reste du monde, aux Etats-Unis notamment.

Au lieu de faire appel à la volonté ou à la motivation, Coué a recours à l’imagination. Il ne s’agit pas de vouloir faire quelque chose, mais de s’imaginer que l’on peut le faire. Une fois l’objectif imaginé, l’inconscient se démène afin de trouver les moyens d’y parvenir. 
Cette méthode mise sur le potentiel de guérison et de mise en action de l’inconscient.

« Ce que mon esprit peut imaginer et penser, il peut aussi le réaliser. »

Emile Coué

Plus récemment, les neurosciences ont prouvé scientifiquement que le cerveau ne faisait pas la différence entre l’imagination et la réalité :
⇨ Certaines études ont mis en évidence que, lorsque l’on s’imagine exécuter une action, un signal neuronal est produit et permet l’activation des muscles nécessaires.
⇨ D’autres études ont montré que, lorsque l’on s’imagine ressentir une émotion, les zones du cerveau affiliées à cette émotion sont activées.

Les électroencéphalogrammes (EEG) montrent une activité cérébrale similaire que nous imaginions ou bien que nous vivions le même phénomène.
L’hypothèse principale est, aujourd’hui, celle des neurones miroirs. Néanmoins, les chercheurs n’ont pas encore trouvé d’explication univoque à ce phénomène.

La visualisation fait appel à la plasticité cérébrale : le cerveau a la capacité de créer et de modifier les connexions neuronales au fil des expériences que la personne vit.
Nous avons vu que ton cerveau ne différenciait pas réel et imaginaire. Ainsi, plus tu visualises un évènement clairement dans ton esprit, plus ton cerveau créé des connexions neuronales en accord avec cet évènement.

💡 Un exemple : La phobie
L’esprit associe une peur irrationnelle à un objet inoffensif dans la réalité.
Le corps réagit alors de la même manière que si le danger était réel : le corps transpire, le coeur palpite, les muscles se raidissent, les mains tremblent, les joues rougissent, etc…

Il est donc possible de suggérer une réalité à ton cerveau !

C’est sur ce principe que repose la visualisation.
Elle envoie un message clair au cerveau en utilisant des images mentales positives.


Quels sont les principes la visualisation ?

Tout d’abord, le terme même de visualisation porte à confusion. Tous les sens peuvent être sollicités, il est possible de visualiser une odeur, un son et même un goût. Les sens peuvent être même cumulés, lorsque l’on se visualise dans l’atteinte d’un objectif par exemple.
En somme, la visualisation consiste à se représenter un élément à soi-même et par soi-même.

✨ Rien de mieux qu’un petit exercice :
Ferme les yeux, concentre-toi sur ta respiration quelques instants. Puis, ouvre la bouche et imagine un quartier de citron : croque dedans à pleines dents ! Et observe tes réactions.
Tu devrais sentir une augmentation de ta salive : ton corps réagit comme si tu mangeais réellement un citron !

Visualiser c’est construire une image mentale puis de la faire évoluer dans son esprit afin de la faire correspondre à son désir.

C’est créer du positif dans ta vie :
—- en retrouvant l’espoir : une fois imaginé, ton but à atteindre devient accessible.
—-en passant à l’action : une fois ton but accessible, la moitié du chemin est déjà faite.


Quels résultats permet la visualisation ?

La visualisation est puissante car elle est applicable à une multitude de domaines !

Visualiser c’est « imaginer des situations et des scénarios afin d’atteindre un mieux-être ou une meilleure performance ».
L’imagination est une création, elle est le premier pas vers ce que tu veux atteindre.

La méthode de visualisation te permet d’avoir une vision à long terme de la personne que tu souhaites devenir.
Tes objectifs deviennent alors réalisables et alignés avec cette vision à long terme.
Un objectif réalisable est un objectif qu’il te sera plus facile t’atteindre à partir de la personne que tu es aujourd’hui, alors qu’un objectif trop ambitieux finira par te décourager.
Un objectif aligné avec ta vision est un objectif qui te permets de ne pas te perdre dans tout ceux que tu souhaites accomplir.

« Si vous pouvez l’imaginer, vous pouvez y arriver ; si vous pouvez y rêver, vous pouvez le devenir. »

William Arthur Ward

Quelques exemples du pouvoir de la visualisation créatrice :
Améliorer ton estime de toi :
—-Aimer ton corps tel qu’il est
—-
Te considérer comme l’égal des autres

Améliorer ta confiance en toi :
—-Te penser comme capable de réaliser de grandes choses
—-Sortir de ta zone de confort

Surmonter les situations de stress :
—-Prendre la parole en public
—-Réussir un entretien d’embauche

Donner vie à une réalité que tu souhaites atteindre :
—-Réaliser un nouveau projet
—-Vivre une vie de famille épanouie

Modifier tes croyances négatives en croyances positives :
—-Avoir une relation de couple saine
—-Agir comme une personne digne d’amour


Et en pratique, comment fait-on ?

La principale règle est de t’imaginer dans le futur en ayant obtenu tout ce que tu souhaites obtenir : un travail épanouissant, une relation amoureuse qui respecte tes valeurs, un « chez-toi » dans lequel tu te sens bien, un entourage qui te porte vers le haut, un corps qui te plait, etc… Laisse parler ta créativité !
En somme, la visualisation te demande d’imaginer une vie idéale dans laquelle tu peux être, avoir et faire tout ce que tu veux.

Pour cela, tu dois créer l’image mentale de cette vie une fois atteinte, en y mettant un maximum de caractéristiques : images, sons, odeurs, mouvements, toucher, paysages, personnes, objets etc...
Puis, il est nécessaire de porter ton attention sur toi ! Quels sont tes émotions, ton état d’esprit, tes sensations ? Quelle personne es-tu dans cette vie rêvée ?

« Ce que vous pensez, vous le devenez. Ce que vous ressentez, vous l’attirez. Ce que vous imaginez, vous le créez. »

Bouddha

L’efficacité de cette méthode réside dans la pratique régulière.
Pour cela, il n’y a pas de recette miracle. Il te suffit te trouver un rythme qui te permet d’inclure, sans trop de contraintes, la visualisation dans ton quotidien. Personnellement, je pratique la visualisation environ 5 fois par semaine, pendant 5 à 30 min, selon l’humeur du jour.

❤️ Ce moment est un instant « self-love », un moment durant lequel tu prends soin de toi.
Il est donc indispensable que ce soit agréable pour toi et non une contrainte. Ne t’oblige à rien mais offre-toi ces minutes durant lesquelles toi-seul compte !

La visualisation créatrice se nomme également visualisation positive.
L’inconscient ignore le temps et se représente plus facilement une phrase sous sa forme affirmative. Il est donc important, lors de la pratique, de penser sa visualisation au présent et de manière positive. Il vaut mieux penser « Je réussi cet entretien » que « Je ne vais pas rater cet entretien ».

La visualisation ne se fait pas à un n’importe quel moment ! Elle nécessite un état de détente et de disponibilité psychique.
—–⤳ La disponibilité psychique nécessite que toute ton attention puisse être mobilisée. Avant de commencer, je te conseille donc de t’assurer que tu ne seras pas déranger.
—–⤳ La détente nécessite un calme extérieur mais également un calme intérieur. Je te propose de mettre une musique d’ambiance, de fermer les yeux et de t’accorder un temps pour te concentrer sur ta respiration, pour relâcher ton corps et faire le vide dans ton esprit.

Dans le Miracle morning, Hal Elrod conseille de pratique la visualisation le matin, avant tout autre activité. Selon lui, il s’agit du meilleur moment pour s’accorder du temps à soi, sans être parasité par les activités extérieures.

Quelques précisions…

La visualisation peut se faire à l’écrit, par la pensée ou par des images.
Peu importe le support, c’est l’attention et l’implication que tu y mets qui importe.
Par exemple, si la pensée te semble trop abstraite, tu peux :
—–tenir un journal de visualisation
—–réaliser un « vision board », sur lequel tu représentes des dessins, de la peinture, des collages, etc…

La visualisation peut être réaliste ou symbolique.
Elle peut être inspirée de votre expérience quotidienne réelle ou faire appel à des symboles forts pour toi.
Par exemple, tu peux t’imaginer heureux dans la réalité ou bien symbolise ton bonheur par une lumière jaune qui irradie de ton coeur.

Dans ta visualisation tu peux être acteur ou spectateur.
Tu peux vivre l’action, cela te permet de ressentir les émotions.
Tu peux aussi te voir en action, cela te permet d’analyser la manière dont tu t’y prends.

En conclusion,

« Les gens ordinaires croient uniquement à ce qui est possible. Les gens extraordinaires visualisent non pas ce qui est possible ou probable, mais l’impossible. Et en visualisant l’impossible, ils commencent à le considérer comme possible. » Cherie Carter-Scott


Bibliographie

Émile CouéLa Maîtrise de soi-même par l’autosuggestion consciente – La Méthode Coué. Marabout, 2013.
Gawain ShaktiTechniques de visualisation créatrice. J’ai Lu, 2020.
Hal Elrod. Miracle Morning. First, 2016.